Un acte de courage inconnu en février 1943

au village de Langlo en Elven

 

 

Le 16 février 1943, à 9 heures, le bombardier B-17 Forteresse- type F-27-BO  aussi appelé Boomerang décollait de Chelveston en Angleterre avec pour mission de bombarder la base sous-marine de St Nazaire en Bretagne. L’équipage américain au nombre de 11 était composé du :

-  pilote Steenbarger Charles J

- copilote Mayo Thomas Palmer

- mitrailleur dorsale et ingénieur Ford Carey Bernard (sergent)

- opérateur radio Dewig Frederick J

- navigateur Carpenter John E junior (lieutenant)

- Mitrailleur avant Varhol Joe J (lieutenant)

-  mitrailleur ventral Lewis Lowell R

- mitrailleur sabord gauche Markland Dale

- mitrailleur sabord droit Wall Donald R (sergent)

- mitrailleur arrière Gilbert Charley L

- photographe Miller Norris C (sergent)

avion

  

  A 11h25, les bombes étaient larguées sur la cible en dépit des attaques de 6 ou 7 chasseurs allemands Focke-Wulf FW-190 depuis 11 heures tapantes. A 11h 32, le bombardier touché descendait en piqué.

Sur ordre du sergent Wall, le mitrailleur M Dale Markland sauta et ouvrit son parachute à 20000 pieds. Après avoir compté 5 parachutes au-dessous de lui, quatre avions de chasse allemands passèrent si près de lui que son parachute fut  balloté mais sans dommage.

Le pilote, après s’être écarté de la formation et s’étant mis à l’abri d’un nuage pour échapper aux chasseurs donnait l’ordre de sauter à 17 000 pieds à Thomas P Mayo. Ce dernier  constata qu’il y avait 7 ou 8 parachutes en l’air.

Je dois préciser que de la formation, trois bombardiers étaient touchés (les 1-2 et 4).

Arrivé à terre, Markland voulu replier son parachute. Mais un coup de vent s’étant  pris dedans, il se rendit compte qu’il était suspendu dans un arbre. Des hommes sont alors arrivés et ont coupé le harnais pour le délivrer. Une française, d’un certain âge, lui pris le bras pour le conduire dans sa maison. Elle le nourrit et lui donna quelques vêtements dépareillés pour couvrir son uniforme, avant de lui indiquer la direction à prendre en quittant la maison. Le principal mot qu’il comprit  pour dire ami était « camarade ». Il marcha à travers champs pendant ½ mile avant de rencontrer un autre français.  Il lui dit « camarade » et ce dernier lui fait signe de le suivre. Peu de temps après, ils rencontrèrent le sergent Ford avec un français et  furent conduits  dans une maison.

Ils étaient arrivés au village de Langlo en Elven.

Quant à l’atterrissage de  Mayo, il fut rude et mouvementé. La chute l’entraîna à plus de 300 yards à travers une parcelle de choux jusqu’à ce qu’il percute un mur de pierre. Le muret longeait une route principale de campagne. Il plia son parachute et le camoufla sous un buisson. Alors qu’il se débarrassait de son équipement de vol, quelques femmes s’avancèrent vers lui. Elles étaient très aimables et voulaient l’aider, mais elles n’arrivaient pas à lui dire où il se trouvait sur la carte qu’il avait extraite de sa pochette spéciale. L’une des femmes envoya un petit garçon chercher son mari. A son arrivée, tous se rendirent  vers sa maison proche de là. Ils lui offrirent un peu de cognac et un manteau. En dépit de leur volonté évidente de l’aider, ils  voyaient bien qu’ils ne pouvaient le faire.

Par la suite, il préféra s’écarter de la route en marchant à travers champs et le long des haies. Autant que possible, il suivait les rivières. Il voyagea ainsi pendant 2 heures. Ensuite,  il utilisa la route avec prudence. Au bout d’une demi-heure, il arriva à un village du nom d’Elven. Dans une des rues, il dépassa un groupe de français d’un certain âge. Ils dirent quelque chose à son sujet alors qu’il s’en allait. Mayo compris à leur façon de parler et au mot « voyage » qu’ils se demandaient s’il était parti pour voyager. Après avoir répondu « oui », il continua sa route. Mais leur amabilité l’incita à revenir vers eux. Ils lui indiquèrent une maison toute proche. Comme il s’approchait de cette maison, un homme en sortit et l’invita à rentrer. Au moment où il lui servait un verre de vin et lui donnait un morceau de pain, un car rempli d’allemands s’arrêta à la maison au bas de la rue. L’homme lui cria « allez vite » et il sortit en courant par une porte donnant sur la rue. Il continua à courir jusqu’à la sortie du village, pour repartir à travers champs. Après avoir parcouru environ 1 mile, il s’écroula contre une haie. Il était  couché là depuis environ 30 minutes quand un agriculteur le découvrit. Il l’amena dans sa maison qui était à l’écart de la route et lui donna de la nourriture et du vin. Il ne savait pas comment l’aider, aussi Mayo le quitta et continua à marcher à travers champs vers le sud-est. Après une heure et demie de marche, et vers 16 heures, il vit deux jeunes labourant un champ. Après s’être fait connaître, ils furent très contents de l’aider. Portant encore sa veste d’officier et ses insignes dans sa poche, les jeunes le conduisirent à la ferme et lui donnèrent tous les vêtements nécessaires. Tout de même, Il garda son gilet de G.I. sous la veste. Les deux jeunes, qui avaient été soldats, lui donnèrent aussi de la nourriture. Dans une chambre, à l’arrière, ils  discutèrent du plan qui consistait à rejoindre Nantes. Vers 18 heures, arriva un fermier qui lui gratifia d’un salut militaire en entrant dans la pièce. Il était très préoccupé à l’idée de l’aider. Mayo lui expliqua de nouveau le plan. Après, le fermier l’invita à dormir sur place. Il dormit presque toute la journée du lendemain. Le 17 février, vers 21h30, tous les quatre s’en allèrent à Questembert.

Pour revenir au village de Langlo, Markland et Ford retrouvèrent  le sergent Miller et le lieutenant

Varhol dans la maison des époux Texier. Ils avaient atterrit à l’ouest du village. Mme Lorgeoux, seule à la maison avec ses deux enfants et le commis, Mr Pierre Lozevis, le mari étant prisonnier en Allemagne, avait apporté les premiers secours. Puis, elle les conduisit dans la maison du couple Texier qui n’avait pas d’enfant. Le lieutenant  était couché avec un bras grièvement blessé. Il leur dit que le lieutenant Carpenter avait été tué dans l’avion par un obus de 20 mm qui l’avait touché en pleine poitrine. En voulant lui porter secours, il avait été touché au bras. Tous les quatre se vêtirent de tenues civiles. Ils  restèrent dans la maison pendant plusieurs heures et dînèrent.

carte 1

Un médecin, le docteur Roblin, avait été guéri par Mme Lorgeoux, en vélo, accompagnée de sa fille de 7 ans. Il banda le  bras du lieutenant et lui dit qu’il pouvait voyager. Ils firent deux groupes et quittèrent la maison dans des directions différentes. Le sergent Ford et Markland arrivèrent en vue de Pontivy à 18 heures.

Plusieurs chasseurs allemands les survolèrent, les obligeant à plonger dans un fossé. Alors qu’ils contournaient Pontivy, un homme à bicyclette essaya de leur parler, mais ils ne s’arrêtèrent pas. Le plan était de marcher jusqu’en Espagne mais la principale préoccupation était de s’éloigner de la zone de saut. Ils marchèrent jusqu’à 23 heures. En passant à la périphérie d’un village, ils aperçurent une lumière dans un hangar. Ils remarquèrent un homme qui fabriquait des chaussures, des sabots peut-être ! Après s’être présenté, l’homme se montra  peu aimable, mais il leur permit  de dormir sur un tas de paille. Le lendemain matin, le 17 février, avant de partir, il leur offrit une tasse de café. Cet homme semblait très pauvre et n’avait rien à leur donner à manger.

Je voudrais juste vous faire remarquer que l’indication de Pontivy me semble erronée, de part les distances. Ils ont dû confondre avec Lantivy en Trédion.

Vers 6 heures, ils reprirent la route. Après avoir parcouru 5 miles, ils  arrivèrent sur une route secondaire qu’ils décidèrent  de suivre. A midi, ils rencontrèrent un fermier près d’une ferme isolée. Dès qu’ils lui dirent « Américain », il les conduisit dans sa maison pour prendre un repas chaud. Plus tard, il leur fit comprendre que les allemands faisaient des recherches fouillées dans la région. Il les cacha dans un grenier à foin où ils restèrent jusqu’au lendemain matin. Le 18 février, à 10 heures 30, leur hôte leur donna un paquet de provisions et indiqua la direction de Saint-Guyomard.

Les deux aviateurs se perdirent après quelques miles de marche et s’arrêtèrent dans une maison pour demander le chemin. Là, un habitant leur offrit un peu plus de nourriture et les conduisit dans un lieu où ils pouvaient voir Saint-Guyomard. A la sortie du village, ils s’approchèrent d’un homme qui s’enfuya à leur vue. A l’autre bout du village, ils se dirigèrent vers quelques personnes qui travaillaient dans les champs. Dès qu’elles entendirent parler d’aviateurs américains, ils furent entourés. Ces personnes leur proposèrent de les cacher. Elles revinrent plus tard et les aviateurs furent conduits dans un endroit où ils rencontrèrent un fermier. Il les embrassa sur les joues et les conduisit dans sa maison en attendant l’aide qu’il avait demandée pour eux.

Un jeune homme ayant quelques connaissances d’anglais leur rendit visite. Il leur annonça la capture du lieutenant Varhol et du sergent Miller (soit le 17 ou le 18 au matin). Ils étaient  tombés chez des collabos. Ceux-ci leur avaient proposé de les cacher, mais une fois endormis, ils les dénoncèrent aux allemands. L’ami qui lui avait raconté cela disait qu’ils s’occuperaient bien des collabos. Le jeune homme s’en alla à bicyclette. Le 19 février, une fois parti, le fermier les amena sur la route qu’il fallait suivre.

Ils marchèrent depuis peu lorsqu’un car les pris en route. Une scie égoïne avait été donnée  à Markland pour le faire passer pour un ouvrier agricole. A chaque endroit où ils s’arrêtaient, on leur donnait la possibilité de se raser. Une personne connaissant l’anglais leur parla et s’arrangea pour les accompagner à Redon. A la gare, tandis qu’ils attendaient dehors, elle acheta, avec leur argent, trois billets, en première classe. Ils prirent leurs billets et arpentèrent le quai, isolément, en faisant mine de ne pas se connaître. On leur avait recommandé de ne parler à personne. Cependant, un homme essaya d’engager la conversation et finit par leur demander s’ils n’étaient pas étrangers. Ils répondirent « américains ». L’homme les fît rentrer dans la gare où il faisait plus chaud et, quand le train arriva, il les confia à ses amis qui allaient vers Nantes. A la gare de Nantes, ils retrouvèrent l’acheteur des billets. Le voyage se déroula sans aucun contrôle.

A Elven, les allemands informés arrêtent, le 05 mars 1943, Mr Texier, puis Mme Lorgeoux, le 09 mars. La fiche de renseignements, dressée le jour même (le 09 mars) à Elven, par le maréchal chef des logis Molinié, commandant de la brigade, mentionne que Mme Lorgeoux, cultivatrice, est propriétaire et exploitante d’une ferme de 23 hectares. S’agissant de la situation de famille, le mari est prisonnier et elle est mère de deux enfants de 10 et 6 ans. Ses 2 enfants sont à sa charge. Comme motif de l’arrestation, il est indiqué qu’elle avait été entendue comme témoin lors de l’atterrissage de parachutiste américain le 16 février 1943 (ADM 2W art 15911).

 

carte 4  

Pendant ces trois semaines, Mme Lorgeoux née Benezic, et Mr Pierre Lozevis, son commis né le

28/02/1921, pour ne pas être repérés, avaient déplacé par trois fois les parachutes, à la lampe tempête. Elle continua à nourrir dans les bois (Penach, Feuvy, la Haye Belle Fontaine) des aviateurs cachés, avec sûrement l’aide de M Lozevis. Trois allemands vinrent arrêter Mme Lorgeoux, qui se savait menacée, accompagnés du maire et de sa belle-sœur, madame Anne Marie Françoise Lorgeoux. Celle-ci devait avoir pour mission de s’occuper de sa nièce, Marie Thérèse, âgée de 7 ans, et de son filleul Alfred, âgé de 12 ans. Après l’arrestation, Anne Marie Lorgeoux et le commis ont continué à porter à manger aux aviateurs cachés dans les bois. Ces faits m’ont été rapportés, le 09 février 2016, par Mme Moisan née Lorgeoux Marie Thérèse. Pour revenir aux parachutes, ils ne se contentaient pas de creuser. Ils donnaient en même temps un « coup de labour ». Des aviateurs seraient ainsi restés camouflés entre 21 et 26 jours dans les bois. Ces aviateurs étaient cachés et déplacés la nuit dans les greniers des fermes de Langlo et Kervoal en Elven mais aussi de Larré et Molac. Une fois, les allemands ont investi une ferme pour trouver un aviateur caché. Ils fouillaient les greniers remplis de foin avec des brocs ou fourches à 2 doigts. Pour éviter d’être pris, cet aviateur se déplaça dans le foin en même temps que le broc. Ces propos ont été recueillis, le 13 mars 2016, auprès de M Daniel Lozevis, fils de Pierre. De plus, je rappelle que selon le témoignage de T Mayo, il avait observé dans le ciel 7 ou 8 parachutes.

Le 15 mars, Mme Texier est arrêtée à son tour. Le 16 mars, toujours à Elven, ce même  maréchal chef des logis, dresse une nouvelle fiche. Il mentionne qu’elle est née à Elven le 15 février 1906, mariée sans enfant, cultivatrice et propriétaire d’une ferme de 23 hectares. Il y a donc une erreur sur la commune du lieu de naissance. Il fallait écrire Saint-Nolff. Elle a été arrêtée le 15 mars. Au motif de l’arrestation, il est écrit que son mari, arrêté le 05 mars 1943, avait donné asile à des parachutistes (ADM 2W art 15911).

 

carte 3

Une équipe (Ford-Markland) a donc tenté de gagner l’Espagne par Elven, Trédion, Saint- Guyomard, Redon et Nantes (1).

L’autre (Varhol-Miller) fut arrêtée entre Elven et Saint-Guyomard (2).

Quant à Mayo, il passa par Elven, Questembert, Nantes (3).

J’ai arrêté l’étude des routes aux limites de la Bretagne. On peut raisonnablement en déduire que les hommes qui ont été aidés par Mme Lorgeoux née Benezic puis par Mme Lorgeoux, Mr Lozevis et sûrement Mr et Mme Texier furent Wall, Steenbarger, Dewig, Lewis et Gilbert.

Mme Lorgeoux, née Marie Benezic, le 16 février 1912 à Questembert (famille originaire de la Vraie-

Croix), est donc arrêtée en mars et sera incarcérée à la prison de Vannes pendant 5 mois. Après, elle rejoindra la prison de Fresnes avant d’être déportée en Allemagne à une date inconnue. Elle a été incarcérée dans la prison de Lauban en Pologne, où étaient détenus des déportés « NN », c’est-à-dire « Nacht und Nebel ou Nuit et Brouilard », avant leur passage devant le Tribunal de Breslau, puis transférée dans les camps de Ravensbrück (matricule 79989) le 26 octobre 1944, Mauthausen (matricule 2140) en Autriche le 07 mars 1945 et enfin Bergen Belsen (camp libéré par les britanniques le 15 avril 1945), où elle décéda le 25 avril 1945.

Pour le Docteur Roblin, je n’ai pas d’information. Sa libération, après 9 mois de prison, serait due au fait qu’il était le seul docteur de la commune. A la fin de la guerre, il quittera la commune. Un second médecin, le docteur Roger Michel, arrivera en 1945. 

Dans son livre, «dans le Morbihan en guerre», Roger Le Roux indique que Jean-Claude Chappotin a été arrêté en même temps que les époux Le Texier et de Mme Lorgeoux et du docteur Roblin. Jean-Claude de Chappotin, né à Saint-Nolff le 05 juillet 1925, est déporté, le 08 mai 1943, de Compiègne vers le KL Sachenhausen (matricule 66221), arrivée le 10 mai 1943. IL avait 19 ans et est décédé le 4 septembre 1944 à Bergen-Belsen. Il y a cependant une erreur dans cette affaire qui est malheureusement reprise dans les différents ouvrages.

En effet, Mr de Chappotin n’a jamais travaillé comme commis de ferme à Langlo. Pierre Lozevis était le seul commis du village et en particulier celui de  Mme Lorgeoux.

A l’origine de la procédure Nacht Und Nebel, était la parution des décrets [XC1] Keitel  des 7 et 12 décembre 1941.Tous les résistants ou personne suspectée d’être en contact avec un résistant est arrêté par la police allemande. Les résistants arrêtés ne devaient plus entretenir aucun contact avec leurs proches. Ceux-ci ne savaient d’ailleurs souvent pas le sort réservé aux détenus de la police allemande. Le décret stipule ainsi que les prisonniers disparaitront sans laisser de trace et qu’aucune information ne sera donnée sur leur lieu de détention.Les sentences pouvaient être la peine de mort, les travaux forcés, les peines de prison ou être directement envoyés dans des camps de concentration.

Les époux Texier, dont madame Amandine Kerhervé, née à Saint-Nolff  le 15 février 1906 au Guernévé, prirent le convoi de Paris vers Trèves le 18 mars 1943. Mme Texier fut transférée dans les prisons de Magdebourg, de Breslau puis au KL Ravensbrück et de Mauthausen. Elle y décéda le 17 avril 1945. Son mari, Pierre né à Elven le 14 avril 1895, après être arrivé le 17 mars 1943 au SL Hinzel, a été transféré au camp disciplinaire de Roll Wald d’où il aurait été libéré le 26 mars 1945. Il y serait décédé le 28 juin 1945. Tous deux étaient aussi des déportés« NN ».

Enfin, Anne Marie Françoise Lorgeoux, née le 07/11/ 1900 à Langlo en Elven, et Mr Lozevis  s’occupèrent des enfants de la ferme pendant les 26 mois suivants.

Le sort réservé aux aviateurs ne fut pas identique.

Charles Steenbarger fut fait prisonnier au stalag Sagan-Silesia avec John Varhol et Frederick Dewig ainsi que Lowell Lewis, Donald Wall et Norris Miller au stalag 17B à Braunau Gneikendorf. Le camp où a été retenu Charley Gilbert n’est pas connu. Thomas Mayo  s’échappa par les Pyrénées et Gibraltar ainsi que Ford  Carey. Le parcourt pour rentrer en Angleterre de Dale Markland n’est pas connu. Mayo regagna cette ile le 28 mars 1943, Markland le 28 juin et Ford le 29 juin. Enfin, le  navigateur John Carpenter fut tué dans son bombardier.

Il est à noter que le Lieutenant Varhol, après-guerre, ne contacta pas la famille Lorgeoux. Il ne sut donc jamais le sort qui avait été réservé aux deux familles.

Quant à l’avion, il tomba dans l’étang de Gournava en Pleucadeuc. Selon des témoignages, Il était en flamme et aurait explosé en percutant l’étang, provoquant une gerbe d’eau d’environ 30 mètres. En 1946, une recherche est mandatée, par les autorités américaines auprès des autorités du port de Lorient. Elles tiennent à s’assurer qu’il ne reste pas de corps dans l’avion ni dans l’étang. Le lundi 02 décembre 1946, l’officier des Equipages de 1er classe Doffin arrive sur place à 13 heures en compagnie de deux scaphandriers et de 3 autres hommes. L’avion est recherché et jalonné. Il repose dans les fonds de 3m50 à environ 350 mètres de la berge sud et 200 mètres de la berge est. Le 03 décembre, à 08heures 30, le radeau, monté la veille, est remorqué avec une plate sur l’épave de l’avion. Des recherches menées entre 9h30 et 11h30, il est remonté un gant et deux masques. L’avion, complètement disloqué, ne forme sur le fond qu’un amas de ferraille et de débris. Malgré une visibilité réduite (50 cm environ) et la présence de tôles disjointes et coupantes rendant l’opération délicate, la position de l’avion sur le fond est approximativement déterminée avant 17 heures. Le mercredi 4 de 08h30 à 9h30 des recherches à la sonde sont effectuées. Des débris sont repérés  à environ 30 mètres à l’ouest de l’épave et en particulier une pale d’hélice et une partie de l’aile gauche. La position de l’épave est redéfinie. Elle est orientée cap au nord-ouest. L’avion est cassé sur l’avant et sur l’arrière de l’aile droite toujours en place. Le fuselage est entièrement ouvert. A 11 heures30, ne trouvant ni corps ni ossements dans l’appareil et sur un rayon d’environ 50 mètres autour de l’épave, les recherches cessent. Huit jours après la disparition de l’avion, selon le témoignage du fermier, habitant à l’entrée de la propriété, les allemands auraient récupéré des vêtements en cuir, des gabardines, des souliers, des parachutes. La conclusion du rapport des recherches était qu’il fallait vider l’étang pour s’assurer définitivement qu’il n’y restait aucun reste humain. Le propriétaire donna son accord mais n’y donna suite.

Les autorités françaises et américaines recherchaient des corps. Précédemment, nous avons pu noter qu’il n’y avait eu qu’un tué. Son corps, peut-être enterré dans les bois par les allemands, se trouve actuellement au cimetière britanno-américain de Saint-James (50).

Aujourd’hui, l’utilisation d’un sonar à balayage latéral permettrait de recenser précisément les débris de l’avion.

Pour Mr de Chappotin, il a donc été associé par erreur à cet acte de résistance. Toutefois, sa déportation est due aussi à un acte de résistance non pas dans le Morbihan mais à la frontière espagnole sur la route de Ahusquy (64).

Mr Jean-Claude Armand, Marie est né le dimanche 05 juillet 1925 à St Nolff au manoir de Kerboulard. En réalité, il s’agit d’une maison bourgeoise, cadastrée C 139, située sur l’ancienne route de Rennes. Le vrai manoir, cadastré C 122, est un petit peu plus loin vers l’est. Il est le fils de Georges de Chappotin âgé de 36 ans et de Sarah Anne-Duportal âgée de 36 ans. A sa naissance, il a deux sœurs : Alberte née en 1920 et Alice née en 1923. Un an plus tard naîtra Georges né le 05 juillet 1926.

Jean-Claude vivait avec ses parents à Ossas-Suhare près de Tardets, dans les Basses Pyrénées, actuellement Pyrénées Atlantiques (64) comme réfugiés. Après avoir conduit une cinquantaine de jeunes volontaires Français pour l’Armée d’Afrique, le 07 mars 1943 (attestation du 27 janvier 1948 à Mauléon-Lichare de Mr C. de Jauréguiberry), il a été arrêté à la frontière espagnole sur la route de Ahusquy, puis interné à Tarbes et déporté le 04 mai 1943 à Oranienburg-Sachsenhausen. Il faisait partie du réseau ALIBI (service d’évasion), depuis mai 1942, donc à dix- sept ans,  de Mr Dominique Etchegoyhen (attestation du 21 juin 1949 à Mauléon-Lichare) ainsi que son frère Georges. Ce dernier a failli être déporté également mais fut sauvé par une postière agent double. Elle a intercédé auprès des allemands pour le laisser en vie en tant que soutien de famille. Le réseau faisait passer des Juifs, des résistants et des patriotes en Espagne. Pour de l’argent, ils ont été dénoncés par un des leurs aux allemands. Au camp de concentration de Sachsenhausen, il est tombé malade en raison des conditions de vie et de travail. Ces détenus malades qui n’étaient plus aptes au travail étaient envoyés à Bergen-Belsen sous prétexte de convalescence. Comme il n’y avait aucun ravitaillement en médicaments, ni nourriture pour améliorer leur état de santé, les détenus y étaient envoyés pour mourir ; ce qui permettait au camp de concentration de demander de la nouvelle main-d’œuvre en remplacement des malades. Il est décédé de tuberculose pulmonaire le 04 septembre 1944, à dix-neuf ans, et a été incinéré au crématoire faisant partie du camp  de Bergen-Belsen. Le Ministère des Anciens Combattants et Victime de Guerre en date du 27 décembre 1950 décide de lui attribuer le titre de Déporté Résistant (Loi N° 48- 1251 du 06 août 1948). Il a aussi été décoré à titre posthume de l‘Ordre National de la Légion d’Honneur, de la Médaille de la Libération et de la Croix de Guerre 1939-1945 avec palme. 

Si vous allez voir le monument aux morts d’Elven, vous trouverez une plaque, dédiée aux morts de 1939-1945, gravée des 2 noms de famille (Lorgeoux-Texier). Il est dommage qu’aucun effort de présentation n’ait pas été fait pour valoriser l’action de ces civils. Quant à Mr de Chappotin, son action est totalement inconnue des nolféens.

En conséquence, il me paraîtrait souhaitable qu’un nom de rue soit donné, à Elven, aux 3 déportés résidents de cette commune et à Saint-Nolff pour Mme Kerhervé Amandine et Mr de Chappotin, tous deux natifs de cette commune.

Remerciements à :

- Mr Le Lan pour la communication de l’adresse de sites internet afférant aux avions tombés en Bretagne et en France.

- Mme Marie Thérèse Moisan, fille de Mme Marie Lorgeoux

- Mr Daniel Lozevis, fils de Pierre

- Mr René Le Breton pour ses traductions des documents anglais

- Mr Bertrand Monraisse qui a répondu à mon annonce sur un site de généalogie à propos de Mr de Chappotin

- Mme Gislaine Mougeot, nièce de Mr de Chappotin Jean-Claude Armand.

Source attestation :

- Monsieur Clément de Jauréguiberry, Commandant Militaire des forces de l’Armée Secrète ayant participé à la libération de la Soule.

Adresse des sites :

-Le site de l'ABSA : http://www.absa3945.com/ il faut aller dans l'onglet "Les pertes aériennes" puis "Morbihan" puis encore "Pertes aériennes".

-Le site France crashes 39 - 45 à l'adresse : http://francecrashes39-45.net/

Recherche aux Archives Départementales du Morbihan :

2W art 15661,15772, 15775,15794, 15909, 15910,15911, 15913.

 

 Fait le 4 mars 2015

  Xavier Carré