Les oubliés du Pas aux biches en Les Forges
Le 18 juin 1944, le commandant Pierre-Louis Bourgoin (1907-1970) lance un appel de détresse à l'aviation Alliée pour tenter de dégager son P.C. de la ferme de La Nouette encerclé par l'ennemi à Saint-Marcel.
En chemin, une petite formation aérienne venant d'Angleterre se détache de la formation principale pour fondre sur une colonne qui progresse vers La Nouée, notation d'époque sur les cartes d'état-major de Lanouée en Morbihan.
Il s'agit d'un groupe d'habitants du Pas-aux-Biches, un village situé sur la commune des Forges en Morbihan, en lisière de l'immense forêt de Lanouée. Ils reviennent des vêpres.
L'erreur de navigation est manifeste, d'autant que le secteur de Saint-Marcel et de Lanouée ont en commun une dizaine de noms de lieux presque similaires : Jagut et Jégu ; Brélan (aujourd'hui Bréhélan) et Bréhan ; La Fosse ; Tréverot et Tréverand ; Bréma et Bréman, La Touche ; La Ville- Morvan ; etc.
Les charrettes qui transportent les femmes et les vieillards sont probablement prises pour des pièces d'artillerie tractées, d'autant que les chapeaux noirs des hommes luisent au soleil comme des casques militaires ; beaucoup ont un parapluie sous le bras, à la manière dont on porte les fusils. Les enfants, informés du débarquement Allié, agitent leurs mouchoirs blancs dans un geste d'amitié à l'intention des aviateurs : erreur fatale, car depuis le cockpit d'un avion aveuglé par le soleil d'été, ce cadencement lumineux aurait été compris comme étant un tir d'armes automatiques.
Les avions piquent et lâchent leurs bombes, faisant quatre morts :
- Roger-Ernest-Marie Chaperon, 14 ans,
- Denise-Rosalie-Marie-Josèphe Bienne, 15 ans,
- Jeanne-Marie Le Guernic, 53 ans,
- Marie-Françoise Mahieux, 69 ans,
Si la première victime a été reconnue comme morte pour la France dès 1949, les trois autres sont retombées dans l'oubli faute de démarche pour obtenir la mention.
C'est maintenant chose faite grâce à l'action de deux chercheurs en histoire locale, Dominique Rouault et
Gérard Jouët, qui ont documenté le dossier présenté à l'ONACVG par Isabelle Cadio, maire des Forges.
Une plaque commémorative, visible depuis l'allée centrale du cimetière des Forges, a été apposée sur leur sépulture que leurs familles ont voulue commune en 1944 (cf. illustration).
Dans le cimetière des Forges en Morbihan, toutes les victimes civiles du bombardement Allié de juin 1944 ont maintenant été reconnues comme étant Morte pour la France.