LA BUTTE de la MALTIERE
Pour présenter ce lieu, reprenons un article paru dans la presse en décembre 1947.
« C’est derrière le camp des prisonniers allemands, entre la Route Nationale de Rennes à Redon et la rabine de la Prévalaye. Une butte de tir ensevelie sous un tertre de verdure. On a dégagé le pourtour et, répondant à l’appel de l’Association des Familles de Fusillés et de Massacrés, M. le Maire de Rennes a donné des instructions à la direction du Jardin des Plantes pour que ce lieu soit entretenu et décoré. En quelques semaines, les services intéressés […] ont transformé le cloaque qui entourait la butte de tir en une pelouse sobrement garnie d’arbustes et de plantes vertes qui donnent au paysage un aspect de nécropole. La Maltière… C’est là que tombèrent, sous les balles allemandes, d’octobre 1941 à la Libération, le plus grand nombre de Patriotes que le tribunal allemand de Rennes avait condamnés à la fusillade. »
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En effet, ce lieu situé sur la commune de Saint-Jacques de la Lande, était depuis très longtemps un terrain militaire où les troupes issues des casernes de Rennes venaient s’entraîner.
En 1937, l’armée décida de construire un entourage à la butte de terre sur laquelle les soldats s’entraînaient à tirer.
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Quand, le 18 juin 1940, l’armée nazie arriva à Rennes, elle connaissait la topographie des lieux. Elle envahit aussi la commune de Saint-Jacques de la Lande qui avait sur son territoire un aérodrome et de nombreux terrains militaires. Les allemands s’installèrent partout et ils furent maîtres des lieux jusqu’à la Libération, le 4 août 1944. En fait, beaucoup y restèrent jusqu’en 1948 puisque la plupart de ces terrains militaires devinrent des camps de prisonniers allemands de 1944 à 1948.
Le journaliste continue : « 89 d’entre ces glorieuses victimes de la barbarie nazie ont pu être inhumées […]. Tous, hélas n’ont pu être identifiés. Mais tous demeurent unis dans le souvenir de ceux qui veulent magnifier leur mémoire comme ils furent, eux, unis dans la mort, sans distinction de classe ou de parti, unis par l’amour commun de la Patrie et par le seul désir de lutter pour chasser hors de France l’envahisseur. »
Quel fut le nombre exact de personnes fusillées en cet endroit ? A quelques unités près, on peut hésiter. Le journaliste parle de 89 Résistants ; la plaque qui fut posée beaucoup plus tard après une recherche approfondie dans les archives et auprès des associations compte 79 noms. En fait, on sait que 2 d’entre eux n’ont pas été inscrits sur la plaque car ils avaient bien été fusillés là mais ils n’étaient pas reconnus comme étant de vrais Résistants. Pour d’autres qui sont inscrits sur la plaque, on hésite sur le lieu de leur exécution. Il est possible que d’autres personnes n’aient pas été identifiées car les Allemands, en 1944, pressés par le risque d’être obligés de partir, fusillaient rapidement, sans procès, sans même laisser de trace écrite. On sait que, quelques semaines après la libération, un ouvrier agricole qui passait par là a été alerté par son chien qui déterrait des cadavres autour de la Butte. Est-ce que ces pauvres gens ont pu être tous identifiés ? Nous ne le savons pas. Les Résistants venaient de tous les départements bretons, parfois même de plus loin. Si les familles ne se sont pas manifestées, il est difficile de les retrouver.
Continuons la lecture de l’article daté de décembre 1947 : « Jusqu’alors, c’est au cimetière de Saint-Jacques, sur leurs tombes, que s’étaient déroulées les différentes cérémonies du souvenir organisées en leur mémoire. Cette année, le Comité du Souvenir des Fusillés de Saint-Jacques dont le Comité d’honneur se compose de M. Robert Billecard, Préfet d’Ille-et-Vilaine, du général Préaud, commandant la 3e Région militaire, de M. Yves Milon, maire de Rennes et de M. Jean Pont, maire de Saint-Jacques de la Lande a décidé d’organiser une manifestation sur les lieux mêmes où furent assassinés, sous le couvert d’une exécution, ceux-là qui avaient fait le sacrifice de leur vie pour assurer la libération de la France. C’est donc au pied même de la butte, à l’endroit précis où les bourreaux exécutèrent leurs victimes que se déroulera la manifestation de dimanche prochain. »
C’était donc, en 1947, la première cérémonie à la Butte de la Maltière. Depuis, chaque année, fidèlement, les officiels, les familles, les amis et, simplement, tous ceux qui se reconnaissent dans les valeurs de la Résistance, se retrouvent le 30 décembre sur ce lieu de mémoire. Bien sûr, tous n’ont pas été fusillés le 30 décembre mais cette date a été retenue car elle a beaucoup marqué les Rennais comme nous le verrons plus loin. Lors de cette cérémonie, on ne manque jamais de rappeler que nous associons à cet hommage tous les Résistants qui ont été fusillés en ce lieu.
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Cérémonies au cimetière de Saint-Jacques de la Lande sur les tombes des Fusillés.
Une des premières cérémonies à la Butte de la Maltière. On reconnaît Madame Vaillant (veuve de Joseph Vaillant fusillé le 30-12-1942) et M. Pont maire de Saint-Jacques de 1945 à 1959.
Dans les années qui suivirent, plusieurs problèmes se posèrent car la Butte de la Maltière faisait toujours partie des terrains militaires.
- Les militaires n’acceptaient pas sur leur terrain la présence des drapeaux rouges des communistes, or ceux-ci voulaient honorer leurs camarades tombés en ce lieu. Pendant plusieurs années les associations proches du PCF se réunirent au Cimetière de l’Est sur les tombes des Fusillés. C’était la période de la « Guerre froide ».
- Le terrain et les voies d’accès n’étaient pas entretenus par les militaires et la Ville de Rennes ou la Ville de Saint-Jacques ne pouvaient pas le faire puisqu’elles n’en étaient pas propriétaires, pourtant, elles jugent alors que « ce lieu hautement symbolique de la Résistance est dans un état lamentable ». En octobre 1953, la commune de Saint-Jacques demande que ce terrain soit remis à l’une ou l’autre des deux municipalités. Elle demande aussi « qu’une plaque soit posée à l’entrée du passage situé le long du mur de la Maltière afin que soit perpétué le passage que les 25 Fusillés du 30-12-1942 ont emprunté pour se rendre au lieu de leur martyr ».
- En 1953, la Ville de Rennes arrive à un accord avec les militaires qui acceptent qu’elle entretienne la Butte ainsi qu’un chemin pour y accéder.
- En 1958, la commune de Saint-Jacques qui demandait à l’armée la cession gratuite de la Butte de la Maltière obtient sa cession soit 2 822 m2 pour le prix de 10 000 F. Elle demande au préfet de déclarer l’utilité publique et l’urgence. En fait, le marché ne sera conclut qu’en 1961.
- En 1971, la commune de Saint-Jacques construit un petit muret pour le dépôt des gerbes et elle aménage les lieux et les accès.
Depuis cette date, la commune de Saint-Jacques assure l’entretien du lieu et de ses abords. La cérémonie est organisée conjointement par les deux communes (Rennes et Saint-Jacques) sous la présidence du préfet et avec l’aide de l’armée.
Suite: Prison Jacques CARTIER à RENNES + Qui sont ces Résistants fusillés par les Nazis à la Maltière?
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