CONVOI N ° 68 parti de Drancy le 10 FEVRIER 1944

Ce convoi comprenait au moins 1500 personnes: seules 52 ont survécu dont Rachel BENZON, née le 3 décembre 1913 à Constantinople. Elle résidait à Port-Maria en Quiberon et avait été arrêtée lors de la rafle des 4 et 5 janvier 1944.Selon Roger Le Roux, à l’arrivée à Auschwitz, le 13 février , les allemands auraient sélectionné pour le travail dans le camp 61 femmes et 210 hommes, les autres victimes dont plus de 200 jeunes gens de moins de 18 ans étaient immédiatement envoyées à la chambre à gaz. Parmi ceux qui ont péri dans ce camp se trouvaient :

Joseph ADATO, né le 28 octobre 1920 en Turquie. Il résidait à Guilliers où il a été arrêté lors de la rafle du 5 janvier 1944. Il avait 23 ans.
Anthony FLEUR, né le 2 octobre 1876 à Besançon, de nationalité française. Il résidait à Quiberon où il était arrêté lors de la rafle du 5 janvier 1944. Il avait 67 ans.

Léa MORHARM, épouse COHEN (Lucie) , née, le 13 décembre 1889 à Constantinople. Résidant à Vannes où elle était arrêtée lors de la rafle du 5 janvier 1944. Elle avait 58 ans.

Lucienne OKRENT épouse SEGAL, née le 1er septembre 1906 à Cracovie en Pologne naturalisée française. Elle avait quitté Paris avec sa fille Liliane née le 1er août 1934 au moment des rafles de l'été 1942 pour se réfugier chez sa soeur Gisèle ROSENBAUM qui tenait un magasin de fourrures, “Au tigre Royal”, à Lorient. Les bombardements de 1943 sur Lorient les contraignaient à réfugier à Plouay, à l'hôtel Bevan puis à l'hôtel du Scorff à Guéméné sur Scorff. Liliane était inscrite à l'école primaire où elle se faisait rapidement des camarades... Le 4 janvier 1944, après avoir consulté le registre des cartes d'alimentation de la mairie de Guéméné, les Allemands faisaient irruption en pleine classe. Devant les fillettes terrorisées, ils réclamaient Liliane SEGAL et l'emmenaient sur le champ. Quelque temps plus tard, la maîtresse de cours moyen recevait une lettre qu'elle lisait en classe. Elle émanait de Liliane qui embrassait toutes ses petites camarades avant de disparaître à jamais. Une lettre expédiée probablement de la maison d'arrêt de Vannes où toutes les personnes prises dans la rafle du 4 janvier étaient restées près d'un mois... Lucienne SEGAL avait 37 ans, la petite Liliane n’avait pas 10 ans quand elles ont été arrêtées puis déportées le 10 février 1944.

Abram MARKOWICZ, né le 18 juillet 1887 à Piotrkow en Pologne, naturalisé français. Il résidait à Lorient, puis se réfugiait à Vannes. Pris dans la rafle des 4 et 5 janvier 1944 en Bretagne. Il avait 56 ans.

Paul PARIS, né le 24 avril 1886 à Gérardmer de nationalité française. Il résidait à Carnac. Il avait 58 ans.

Ida GRINSPAN, née à Paris en 1929, réfugiée dans le Poitou, faisait aussi partie de ce convoi N° 68. Voici des extraits de son témoignage :
« Le 10 février 1944, la police l'a conduite, en autobus, à la gare de Bobigny où elle est livrée aux Allemands. Là, dans un wagon à bestiaux, de la paille, un petit bidon d'eau, un baquet en guise de tinettes, le voyage dure 3 jours et 3 nuits. Ils sont 60 à 80 par wagon plombé avec une lucarne. L'eau a manqué, la tinette a débordé, la puanteur est le pire de ses souvenirs de déportation. Des adultes ont mis des couvertures pour faire une séparation. Le train a stoppé le 13 février 1944. Partis le jeudi, ils sont arrivés le dimanche matin. Tous ont poussé un soupir de soulagement. Enfin, on arrive. On a déplombé les wagons, et ce sont les cris, les hurlements des SS, les aboiements des chiens. Raus Schnell. Ida est favorisée parce que ses parents parlaient le yiddish. Quand on ne comprenait pas, on était battu. Ils ont sauté des wagons, dans la neige. On leur a demandé de tout abandonner. Et les provisions données par sa nourrice pour sa mère ? Un SS se tient à la tête de la file des déportés, avec une badine. Les hommes à gauche, les femmes et les enfants à droite. "Ceux qui sont fatigués montent dans des camions, ceux qui peuvent marcher, vous restez là". Les familles sont séparées. Ida a suivi deux jeunes filles. Elle s'est placée sur le côté et a échappé par miracle à la sélection, grâce à sa coiffure à houppette qui la grandissait et à sa bonne mine de "campagnarde". Le SS n'a rien demandé. S'il avait demandé son âge...»

Le commandant d'Auschwitz, le S.S. Rudolf HOESS, a raconté lui-même, avec un incroyable cynisme, les scènes auxquelles il assista lors des sélections à l’arrivée au camp :« Nombreuses étaient les femmes qui cherchaient à cacher leur nourrisson dans les amas de vêtements. Mais les hommes du commando spécial veillaient et parvenaient à convaincre les mères de ne pas se séparer de leurs enfants (...). Dans cette ambiance inhabituelle, les enfants en bas âge se mettaient généralement à pleurnicher. Mais après avoir été consolés par leur mère ou par les hommes du commando, ils se calmaient et s'en allaient vers les chambres à gaz en jouant, ou en se taquinant, un joujou dans les bras. J'ai parfois observé des femmes déjà conscientes de leur destin qui, une peur mortelle dans le regard, retrouvaient encore la force de plaisanter avec leurs enfants et de les rassurer. L'une d'elles s'approcha de moi en passant et chuchota en me montrant ses quatre enfants qui se tenaient gentiment par la main pour aider le plus petit à avancer sur un terrain difficile : « Comment pouvez-vous prendre la décision de tuer ces beaux petits enfants ? Vous n'avez donc pas de cœur ? »

 

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